Après un passage à Rennes au Jardin Moderne, Et On Tuera Tous Les Affreux effectuait une release party samedi 10 juillet à La Pétroleuse à Caen pour la sortie de son premier album « Mange Tes Morts ».
Rencontre avec Julien et Léa.
Et On Tuera Tous Les Affreux est un groupe de punk hardcore caennais. Pouvez-vous nous faire une petite présentation du groupe ?
Julien : EOTTLA a commencé à l'été 2018, avec Pierre qui est aussi batteur de Mercury Tales, quand les autres n'étaient pas dans le coin et qu'on avait envie de jouer. On a commencé tous les deux, puis est venue Léa au chant, suivi par Flo à la basse. Flo a quitté le groupe en mars 2020 et Simon qui était déjà notre pote est arrivé.
L'idée de départ était de faire quelque chose de différent de Mercury Tales, plus rentre dedans, en jouant sur les clichés du hardcore, mosh part, blasts etc... Le but était de monter un groupe qui puisse jouer du jour au lendemain si on nous le demandait (ce qui n'était pas possible avec Doris en Angleterre pour Mercury Tales).
Vous vous inscrivez dans le mouvement Queer Punk. Comment peut-on définir ce mouvement ainsi que votre musique, notamment dans les textes et leur aspect revendicatif ?
Léa et Julien : L'idée du mouvement Queer Punk c'est de revendiquer un éloignement de l'hétéronormativité et de la binarité du genre. Et même de manière générale d'une société patriarcale avec laquelle nous sommes en désaccord.
Ce qui était nécessaire pour nous, c'était nous représenter personnellement et représenter nos idées au travers de notre musique. Notamment un féminisme qui inclue les personnes trans, inter, les travailleurs et travailleuses du sexe.
Nous voulions aussi nous sortir de l'ambiance de "boy's Club" très présente dans la musique et plus particulièrement dans le Punk et le Metal.
Les groupes Queer Punk ou Queercore représentent cette mouvance dans la "scène". En y dénonçant par exemple, mais pas que, les clichés masculinistes, et les "bros" très présent dans la scène hardcore.
En ce qui concerne les textes des chansons, ils évoquent tantôt des idées politiques tantôt des sentiments plus intimes ou encore des hommages à différent-e-s artistes. J'essaye de varier les façons d'écrire : seule, à plusieurs ou encore par collage.
Avec nos textes nous parlons de relation à notre propre corps et à nous même, de nos angoisses, de notre incapacité à nous intégrer ou de notre colère.
Après 2 EP (« Demo », mars 2019 et « Live dans le Garage », mars 2020), vous avez sorti votre premier album (Mange Tes Morts, 18/06/2021). Comment s’est construit cet album ?
Julien : On a enregistré l'album sur 4 jours en juillet 2020 au studio Sylvebarbe avec Louis Ramel. Louis a mixé le tout et ça a été masterisé par Jack Shirley des studios Atomic Garden à Oakland. J'ai rencontré Jack quand j'ai fait jouer son groupe Comadre à Caen en 2010. J'ai pu écouter son taff de mastering sur l'album de Mental Distress, je me suis dit que ça pourrait être cool de faire ça avec lui. Ça a donné un regard extérieur à l'ensemble du mix aussi.
Les morceaux ont été composés entre ce moment-là et la sortie de la démo. On les avait déjà rodés en concert. On compose constamment donc on avait déjà ce qu'il fallait en arrivant en studio.
En termes de production pure, je dirais que Louis a amené sa patte, que les membres du groupe ont amené leurs idées, je pense notamment à Simon pour le son de basse, mais malgré tout je suis assez control freak et j'avais une idée très précise de là où je voulais aller et de comment je voulais que ça sonne. Y'a des choses qui ne sont pas parfaites et qu'on referait peut-être autrement mais dans l'ensemble on est quand même super content.
J'ai réalisé le visuel avec l'aide de Dan de Toxic Wotsit Records pour rentrer ça dans le format pochette et Léa a écrit toutes les paroles à la main dans un carnet et j'ai créé l'insert à partir de là.
Le plus dur a été de trouver des labels, on a eu assez vite des retours positifs de 2 ou 3 mais la période est ce qu'elle est et ça coute cher de sortir un vinyle. J'ai envoyé une bonne cinquantaine de mails à des labels que j'apprécie, qui ont sorti des groupes et des disques que j'aime pour au final mettre en place cette coprod à 9.
Sur les titres éponymes de l’album, « Mange tes morts I » et « Mange tes morts II », vous avez collaboré avec Francis Doomer qui les a composés et les interprète. Pouvez-vous nous parler de cet artiste ?
Léa : Francis Doomer, c'est quelqu'un qui a toujours été présent autour de nous d'abord en tant que copain et soutien du groupe, puis très rapidement on s'est mis à évoquer des possibilités de tournée, de concerts ensemble. C'est quelqu'un dont nous suivons la musique depuis très longtemps, il a créé avec plusieurs d'entre nous sur d'autres projets persos. C'est donc naturellement qu'est venue l'idée de l'intégrer dans l'album quand on a eu envie d'avoir des interludes. Nous étions très enthousiastes à l'idée de cette collaboration.
Francis est assez indéfinissable musicalement, il y a un monde entre les sons qu'il a fait pour nous qui penchent vers le gabber et ce qu'il fait actuellement qui s'oriente plus vers la pop électro mélancolique (shout out to Fast Cars and Bad Boys qui est une merveille).
Julien : C'est aussi un collègue de label désormais, chez Sylvebarbe Records, qui a participé à la sortie vinyle et a géré la sortie numérique sur les plateformes. C'est aussi au Sylvebarbe Studio qu'on a enregistré. C'est un label créé récemment qui met l'accent sur des artistes locaux, tous genres confondus (Hada, Atheba, Francis Doomer, Et On Tuera Tous Les Affreux)
Julien, tu es également membre de Mercury Tales comme nous l’avons vu, et pendant le confinement tu as également participé à un autre projet avec ton frère, hln. Ces périodes de confinements successifs ont-ils été propices à la composition avec ces trois différents projets ?
Julien : Mon problème c'est que je compose tout le temps (comme une fuite en avant ?). C'est parfois dur de me suivre, à peine un morceau terminé ensemble que j'en ai trois autres derrière… A ce niveau-là ça n'a pas changé grand-chose.
J'ai tout le temps envie de jouer, créer… Ce qui a évidemment été un gros problème pendant les confinements c'est : pas de répète. Pour moi, c'était la frustration ultime.
Et pendant les semaines de répit entre deux confinements, les autres n'étaient pas forcément aussi disponible que moi pour jouer…
C'est de là qu'est sorti hln. Mon frère avait envie de jouer aussi, Mercury Tales est un peu en stand by en ce moment, Doris a des soucis de santé qui font qu'elle ne peut pas faire grand-chose. Donc on a commencé ça tous les deux. En se considérant dans la même bulle familiale on a pu répéter pendant les confinements.
On avait déjà l'envie et j'avais commencé un morceau quand notre grand-mère dont nous étions très proche est décédée. Les premières répètes ont aussi servi de défouloir et de moment pour se retrouver tous les deux.