Focus Music-Box #38 : Concordski

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Octobre 2022
Focus Music-Box #38 : Concordski

 

Eugénie Leber vient de sortir son premier EP avec Concordski le 23 septembre 2022 chez WeWant2Wecord. Elle nous parle de son nouveau projet mais également de son passé de musicienne auprès de AV ou encore de Marc Desse.

 

Peux-tu nous présenter ton projet Concordski et nous parler de ce que tu as fait avant sur le plan musical.

Je vais peut-être commencer par ce qui s’est passé avant Concordski. Au départ, j’ai rencontré quelqu’un qui s’appelle Adrien Viot (AV) qui était à l’époque animateur sur Oui FM. Dans le cadre de son travail d’animateur, quand je l’ai rencontré, on a discuté et il m’a fait écouter sa musique en me disant qu’il cherchait quelqu’un pour faire de la basse. A l’époque, j’habitais en région parisienne à Torcy. J’ai écouté son single « Venus Bar ». C’était une grosse influence et un retour à la cold et au new wave, ça m’a bien plu et c’est comme ça qu’on a commencé à travailler ensemble. Il y a eu un groupe, ça a duré peut-être six ou sept ans.
Adrien m’a présenté Marc Desse et je suis tombée fan de sa musique également. J’ai joué avec lui, et pendant un moment, j’ai réussi à faire les deux, être bassiste de Marc Desse et bassiste de Adrien. C’était une super époque. Sur les deux projets je ne participais pas aux compositions.

 

Tu étais bassiste studio et live ?

Bassiste live uniquement, en studio ce n’était pas moi. On a notamment joué en première partie d’Etienne Daho et c’était chouette. A cette époque-là, en 2012 ou 2013, Etienne Daho avait à cœur de choisir des groupes totalement dans son sillage pour faire ses premières parties. 
Plus tard, AV a préféré tester une autre formule, beaucoup plus électronique, presque techno. Il a donc réduit le line-up. Marc Desse a de son côté également réduit le line-up. 

 

Il y a également eu une collaboration avec Batist.

Batist a toujours été quelqu’un que je fréquentais dans ce petit milieu. Il fait de super chansons, et il a voulu les jouer en mode grunge et en power trio. On a formé un trio avec Rémi Faure, le batteur de Mustang, Batist et moi. Ça n’a pas duré longtemps parce que j’étais déjà installée à Caen et ça me faisait trop d’allers-retours entre Caen et Paris. 

 

Pour le coup, ce power trio n’était pas du tout coldwave. 

Non, pas du tout. Batist, c’est vraiment devenu un ami. C’était super, parce que c’était très exutoire. On a fait pas mal de concerts ensemble. En ce moment, Batist refait des chansons très dépouillées, mais de magnifiques chansons. On pourrait croire que c’est chiant, mais pas du tout. 
Donc, toutes ces multiples participations à plusieurs projets avec tous ces superbes personnes m’ont poussée à me lancer. J’avais des idées et c’était un peu frustrant de n’être qu’interprète. Et le fait d’être musicienne, à chaque fois « la fille du groupe », tout ça a fait qu’à un moment donné, j’ai eu envie de me mettre plus en avant en tant que compositrice.

Image retirée.
© Maud Noël

En tant qu’artiste, mais également en tant que femme, tu avais envie de t’exprimer par ton propre projet ?

Les anecdotes comme « je vais t’apprendre à régler ton ampli », c’est fou…  Franchement, on pourrait se mettre à plusieurs filles et écrire un bouquin avec toutes les petites phrases récurrentes de ce type que l’on entend çà et là. Faire de la musique sur scène, c’est toujours une mise en avant gratifiante. J’étais persuadée d’avoir quelques bonnes idées donc je m’y suis mise en arrivant à Caen en 2017 parce que j’avais plus de temps.

 

Et dans le projet Concordski, c’est toi qui composes et qui écris les textes ?

Oui, je voulais tout faire. Au début, je ne voulais pas mettre de paroles et je voulais ne faire que des trucs instrumentaux. Je me suis jetée corps et âme dans les synthés et j’adore ça. Je voulais faire des instrumentaux très mélodiques, très harmonisés. L’influence principale pour moi, ce sont clairement les premiers albums de Metronomy, parce que c’est très instrumental. C’est une mélodie, une autre par-dessus, encore une autre par-dessus, et ça colle toujours hyper bien. Ça m’impressionne, et je voulais faire ça. 
Quand je suis arrivée à Caen il y a cinq ans à peu près, j’ai parlé de mes morceaux instrumentaux autour de moi, et globalement on me répondait que c’était dommage qu’il n’y ait pas de paroles. Je m’y suis mise, et pour le coup, c’était un exercice totalement nouveau. Ça m’a pris du temps pour écrire les premières phrases, puis j’ai peut-être trouvé mon style. 
Par exemple, dans le chant en français, j’adore les paroles de La Femme. Ils font des textes très simples, c’est efficace, ça sonne bien et le message est clair. C’est pareil en ce qui concerne Etienne Daho. Je trouve qu’il n’y a pas besoin d’utiliser des mots trop compliqués pour être poétique. Je suis un peu allergique aux chansons qui se veulent trop poétiques. Je me suis dit qu’il fallait rester simple. J’ai essayé d’écrire des chansons d’amour, mais je n’y arrive pas, je trouve que c’est trop intime. Mes paroles racontent plutôt des voyages qui se finissent mal (rires).

Image retirée.

Ces thèmes sont un peu récurrents dans l’EP ?

Oui, mais ce n’est pas fait exprès. Je m’aperçois que mes histoires se finissent toujours mal, et même pour les nouvelles chansons que j’ai faites depuis, c’est toujours ça. Ce ne sont pas toujours des voyages, mais ce sont souvent des histoires de gens mal intentionnés qui font du mal aux autres (rires). Et c’est souvent lié à des films que j’ai vus également.

 

Et quelles influences cinématographiques par exemple ?

Il y a les films d’horreur, les films de guerre quand ils sont bien faits et quand ils m’émeuvent. Sur l’EP, il y a le cinquième morceau qui s’appelle « HMS Scarborough » que j’ai écrit juste après avoir vu le film « Dunkerque » dont je ne connaissais pas l’histoire. Je n’ai pas trouvé le film très fou, mais ça m’a touchée. J’aime également le film « Voyage au bout de l’enfer » (Deerhunter). Ce film m’a vraiment obsédée. Mis à part les films, il y a aussi les voyages que je fais beaucoup en train qui m’inspirent.

 

D’où le titre de l’EP « Intercité ».

Pour l’anecdote, l’histoire de ce morceau m’a été inspirée juste avant de déménager à Caen, époque où je travaillais à Montreuil et habitais à Joinville-Le-Pont. Je prenais la ligne 9, et pratiquement le dernier jour où j’allais travailler, quelqu’un se jette sous le métro sous les yeux de tout le monde. Ça m’a vraiment bouleversée, et je me suis dit que Paris, c’était trop violent. Comme je prenais beaucoup l’Intercité à l’époque, j’ai transposé cette histoire. Ce titre raconte l’histoire de quelqu’un qui attend le train, tout le monde est stressé sur le quai, et il y a une personne qui se jette sous le train quand ce dernier finit par arriver. Je pense que prendre un transport comme le train ou l’avion peut être stressant pour un bon paquet de personnes.

 

Et quelles sont les histoires des autres titres de l’EP ?

« Bayonette » c’est lié à un jeu vidéo que j’ai adoré qui s’appelle Bayonetta… c’est le premier jeu vidéo que j’ai fini de ma vie (rires). C’est très Heroic Fantasy, même si je n’aime pas ça dans l’absolu, mais ça m’a fascinée. Les développeurs de ce jeu se sont dit qu’ils allaient créer une héroïne en pensant à l’archétype féminin qui ferait le plus fantasmer les hommes… un sondage a été fait et évidemment, seins, fesses, taille fine, etc. combinaison très moulante, talons aiguille, cheveux courts et lunettes étonnamment ! Ah ouais ? Donc cette chanson parle de cette héroïne-là. Ce jeu vidéo n’est clairement pas destiné à un public féminin, mais je me suis dit que j’allais faire une chanson sur cette meuf (rires).
« Cardigan », c’est une chanson de haine, parce que j’ai essayé de faire une chanson d’amour et que je n’y arrivais pas. C’est à propos de quelqu’un qu’on déteste, mais ça ne vise personne en particulier. C’est complètement fictif.
« Apollo » est inspiré du film Apollo 13. J’ai imaginé ce qu’ont pu ressentir et vivre les astronautes quand ils étaient de l’autre côté de la lune. La chanson se termine mal alors que dans le film, ils s’en sortent. 

 

Pour parler de ton label WeWant2Wecord, comment et quand s’est faite cette rencontre ?

Laurent, qui gère le label, est quelqu’un que Peter, de Gomina m’avait présenté. Avant cela, j’avais rencontré Peter lors d’un concert en commun Marc Desse et Gomina et on avait gardé contact. WeWant2Wecord était le label de Gomina. On est devenus bons copains avec Laurent, qui fonctionne pas mal au coup de cœur lorsqu’il s’agit de son label. Juste après le confinement, des amis ont organisé un petit festival chez eux, complètement privé. Ils m’ont proposé d’y jouer, et même si je n’étais pas ultra enthousiaste à l’idée de faire du live toute seule, j’y suis allée. J’étais avec mes synthés et mon ordinateur. Laurent était là, et à la suite du concert, il m’a dit qu’il avait bien aimé et que si je cherchais un label, il serait d’accord pour sortir le EP. C’était au tout début d’été 2021. Lors de ce concert, j’ai joué mes cinq chansons, et ça a duré une petite demi-heure, je n’ai pas osé faire plus. C’étaient les plus abouties.

 

A la base, tu étais bassiste. Pourquoi ce passage de la basse au synthé ?

J’ai beaucoup fait de piano classique et j’ai toujours beaucoup aimé ça. C’est pas mal Peter, qui jouait du synthé dans Gomina qui m’a initiée. Il a toujours eu plein de synthés et forcément, au bout d’un moment ça m’a un peu attirée. Peter m’a mis le pied à l’étrier. De premier abord, ce sont des machines un peu compliquées. Au début, je n’y connaissais rien, je n’avais pas du tout l’oreille pour ça. J’ai découvert qu’il y avait plein de sortes de synthés différents. J’en ai acheté un qui était dans mon budget et j’ai pas mal tripé avec. Et à force d’entendre des trucs et de regarder des démos de synthé sur Youtube, j’ai revendu mon synthé pour en acheter un que je trouvais meilleur, que j’ai fini par revendre également. Petit à petit, j’en ai eu quelques-uns. Je n’en ai jamais eu énormément, j’essaie toujours d’en avoir environ cinq, mais pas plus.

Image retirée.
© Cécile Schuhmann

Et est-ce qu’il y a des synthés qui ont un meilleur son pour la musique que tu fais ?

A force d’en jouer et d’en écouter, on a l’oreille qui se développe pour être attentif aux subtilités. J’adore la musique faite dans les années 80, il y a les synthés monophoniques, polyphoniques. J’aime bien les synthés polyphoniques parce qu’on peut faire plein de notes en même temps. Dans mes morceaux, il y a toujours une basse et des mélodies. C’est un peu tout le temps pareil, mais là où il y a une différence entre les morceaux, c’est concernant la longueur des thèmes. Plus la mélodie est longue et reste dans la tête, plus je me dis que c’est une bonne chanson. J’aime bien tester des trucs, superposer des mélodies.

 

Tes notions de piano t’ont aidée pour ça ?

Pour la dextérité, oui. Sinon, je fais beaucoup de programmations en MIDI, donc la plupart du temps, je joue un truc de base mais je modifie les notes après sur l’ordinateur. Ce qui permet de faire des choses impossibles. Par exemple dans « Intercité », il y a un gimmick avec un son un peu techno qui est infaisable pour un humain. Sur scène, c’est un sample parce que c’est injouable. Finalement, l’ordinateur joue des trucs impossibles, et c’est pas mal parce que ça crée la surprise aussi. Et la batterie, c’est toujours la même, une TR-707 qui pour moi est la meilleure parmi les boîtes à rythme  abordables. C’est une boîte à rythme des années 80 qui a été utilisée sur des tubes de Madonna par exemple.

 

Quelles sont les prochaines dates pour toi ?

Il y a une date de calée à Rennes le 19 novembre au Bistrot de la Cité. Je ne connais pas mais on m’a dit que c’était un lieu très chouette. Je n’en ai pas encore parlé ici, mais sur scène, on joue à deux maintenant dans le groupe ; en arrivant à Caen, j’ai joué dans Torrent d’Amour, et Fanny qui jouait dans le groupe aussi joue maintenant avec moi dans Concordski. Fanny gère deux synthés en même temps et elle fait les chœurs. Ça fait vachement plus vivre la musique et c’est plus intéressant. On s’entend vraiment bien et elle a de bonnes idées.
Pour en revenir à l’EP, ce qui me plaît, c’est qu’il y a un réel enthousiasme autour du disque. Il vient du fait qu’il y avait un titre en écoute sur les plateformes avant la sortie. J’ai pas mal fait tourner le lien privé d’écoute, et les gens qui ont précommandé l’EP avaient accès à toutes les chansons du disque. Les retours sont bons pour l’instant et je suis plutôt contente.

 


Concordski

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© Cécile Schuhmann et Maud Noël

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